La France retire ses troupes du Niger. La France rapatrie également tout le personnel diplomatique du pays. Le message d’Emmanuel Macron lors d’une émission télévisée le 24 septembre est un renversement complet des déclarations précédentes.
Dans une interview accordée aux journalistes à la télévision aux heures de grande écoute dimanche soir 24 septembre 2023, axée principalement sur la crise économique et le changement climatique, le président Emmanuel Macron a brièvement évoqué que « la coopération militaire avec les dirigeants de facto du Niger prendra fin ». Les quelque 1 000 soldats présents dans le pays seront retirés cette année. Le personnel diplomatique français sera rapatrié « dans les prochaines heures ».
Macron a pris cette décision après des conversations téléphoniques avec le président légitime Mohamed Bazoum et avec les dirigeants de l’organisation de coopération régionale CEDEAO. Les perspectives de réintégration de Mohamed Bazoum suite aux sanctions et à la menace d’une intervention militaire de la CEDEAO se sont évanouies deux mois après le coup d’État militaire.
Cette décision a été accueillie avec joie par la junte et par de nombreux jeunes Nigérians qui ont récemment manifesté devant les bases militaires françaises. Désormais, des milliers de manifestants se sont rapidement rassemblés à un carrefour proche de la plus grande base française. Le gouvernement militaire a déclaré qu’« un autre pas vers notre souveraineté a été franchi » et que l’événement est « …un moment historique qui montre la détermination et la volonté du peuple nigérian ».
La décision de Macron constitue un renversement de la position ferme précédente selon laquelle seul le président légitime peut mettre fin aux accords de défense. La France a jusqu’à présent pleinement soutenu les menaces d’intervention militaire de la CEDEAO. Mais désormais, il est déclaré que la France continuera à œuvrer pour la libération de Bazoum et le retour du Niger à l’ordre institutionnel. La destitution de l’ambassadeur ne signifie pas une rupture des relations diplomatiques, comme ce fut le cas au Mali et au Burkina Faso en 2022. L’aide au développement et le soutien budgétaire ont été suspendus, et les échanges culturels et les études universitaires ont effectivement cessé depuis l’arrêt de la délivrance de visas.
Profil inférieur des États-Unis
Il y a un débat dans les médias français sur la façon dont la décision initiale instantanée de Macron non seulement de condamner le coup d’État mais aussi d’exiger à tout prix la réintégration de Bazoum – en le répétant encore et encore – a conduit la France dans une impasse. Les États-Unis, qui disposent également de bases et de plus de 1 000 soldats au Niger, se sont retenus et ont évité les critiques.
Macron n’a pas précisé les raisons de ce changement de politique, mais beaucoup ont témoigné de la situation de plus en plus difficile dans les bases, avec des pénuries croissantes d’eau, de nourriture et d’essence (cette dernière est également nécessaire pour faire fonctionner les générateurs électriques). Les négociations se sont poursuivies jusqu’au bout – non pas sur la question de savoir si, mais comment – les troupes françaises et tout le matériel seraient retirés. Auparavant, l’espace aérien nigérian était ouvert à la circulation, à l’exception des vols civils et militaires français. L’espace aérien étant fermé, la retraite vers le Tchad voisin, où la France compte déjà 1 500 soldats stationnés, était la seule option. D’autres pays européens qui disposent d’armées au Niger, comme l’Allemagne avec une centaine d’hommes et l’Italie avec 200 hommes, se trouvent fondamentalement dans la même situation que la France et doivent également décider d’un (éventuelle) retrait.
Troisième malheur
Il s’agit du troisième revers des forces armées françaises en deux ans après le Mali et le Burkina Faso, mais le pire depuis l’élection de Macron à la présidence en 2017. Macron lui-même et plusieurs hauts responsables militaires avaient appelé au retrait des troupes de Barkhane au Mali et à l’intervention spéciale. forces armées françaises au Burkina Faso, mais le retrait forcé du Niger constitue un coup dur pour l’ensemble de l’establishment militaire français.
Hans Eriksson
Politologue, économiste du développement, expert de l’Afrique de l’Ouest
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